J. Krishnamurti Carnets
Traduit de l'anglais par Marie-Bertrande Maroger
Ojai, 29 juin 1961 POSSÉDER, être possédé, est considéré comme une forme d'amour. Cette faim de possession, que ce soit d'un être ou d'un bien, ne provient pas simplement des exigences de la société ou des circonstances, sa source est beaucoup plus profonde. Elle réside dans les tréfonds de l'isolement. Chacun essaie, à sa manière, de combler cet espace, que ce soit par la boisson, une religion organisée, une croyance, une forme d'activité. Tous ces subterfuges sont des fuites, mais l'isolement demeure. [...] Maîtriser l'autre, le façonner au nom de l'amour, est le besoin de possession, de sécurité et de réconfort que l'on espère trouver auprès d'autrui. L'oubli de soi en faveur d'un autre, d'une activité, est en fait l'attachement. Cet attachement engendre la souffrance et le désespoir qui susciteront une réaction, celle d'être détaché. Et de cette contradiction d'attachement-détachement naissent conflit et frustration. Il n'est pas de fuite possible devant l'isolement: il est un fait et fuir devant les faits engendre confusion et souffrance. Mais ne rien posséder, fut-ce une idée et à plus forte raison une chose ou une personne est un état merveilleux. Quand l'idée, la pensée, prend racine, elle est déjà devenue possession, et aussitôt commence le combat pour s'en libérer. Et cette liberté n'en est pas une, elle n'est que réaction. Les réactions s'enracinent et nos vies sont le sol dans lequel elles peuvent croître. Couper toutes ces racines, une à une, est une absurdité psychologique, du reste impossible. Cela ne peut se faire. Il n'y a que le fait, l'isolement, qu'il faut reconnaître, et tout le reste disparaîtra. Krishnamurti’s Notebook, 1975
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575
pages
1961-06-29 - Carnets - Ojai
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